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109. ÉPITAPHE DE IÉSOU-FILS-DE-MARIAMÈ

Département d'Art de l'Orient chrétien, inv. 198759 (fragment en forme de triangle au milieu du côté droit) + 198763 (trois fragments en haut du côté gauche portant le même numéro d'inventaire) + 198842 (tout le bas de la plaque); le petit fragment visible sur la photo tout en haut ne porte aucun numéro d'inventaire.

Lieu et contexte de la découverte inconnus. Achetée en été 1904 par Otto Rubensohn à Luxor à l'agent consulaire allemand Moharreb Todros pour la collection du Lyceum Hosianum à Braunsberg, depuis 1947 au Musée National de Varsovie. La pierre provient très certainement de Nubie septentrionale et, plus précisément, de la région de la seconde cataracte du Nil; la provenance « Faras » que l'on trouve chez Kubińska est arbitraire quoique probable.

Grès rose. Dalle rectangulaire aux dimensions: h. 63 cm, l. 30 cm, ép. 9 cm. La photographie de la dalle publiée dans: Verzeichnis Braunsberg, Winter-Semester 1905/6, p. 3, montre bien qu'elle était alors cassée obliquement en deux parties inégales dont la plus grande correspondait à tout le bas du monument (fragments actuels 198759 et 198842) alors que la petite au coin supérieur gauche (y compris les fragments qui portent aujourd'hui le numéro d'inventaire 198763). Les bords de la cassure se touchaient très étroitement, seul le coin supérieur droit était ébréché. Depuis ce temps-là, vraisemblablement suite aux tourmentes de la guerre, l'état de la plaque s'est nettement détérioré. Les parties supérieure et inférieure ont subi d'autres dégradations, différents fragments du monument ont connu un sort différent. Sur la photographie publiée par Sadurska, RMNW 3 (1958), p. 177 et Kubińska, Faras IV, p. 51, fig. 14, on ne voit que le fragment du bas (no. d'inv. 198842), les autres fragment ayant été considérés comme perdus. Pendant la conservation effectuée en février 1988, d'autres fragments ont été identifiés et recollés. A l'heure actuelle, le monument se compose de six fragments qui donnent l'idée de l'ensemble de la plaque. Il manque l'extrémité supérieure de la plaque sur toute la longueur (le fragment visible sur la photo, tout en haut de la pierre, est restitué incorrectement) et un grand fragment à la mi-hauteur de la bordure gauche. Les bords des cassures sont fortement ébréchés, surtout dans la partie médiane de la plaque; la surface de la pierre est érodée, plus spécialement au bas de la plaque. Sur la face avant de la dalle se trouve un champ évidé de forme rectangulaire aux dimensions: h. 59 cm, l. 24 cm. L'inscription occupe environ 6/7 du champ, la partie inférieure (env. 1/7) est restée non inscrite. Gravure peu soignée. Les lignes du texte, surtout au bas de l'inscription s'élèvent de gauche à droite. Lettres de hauteur inégale, de 0,6 cm (omicron, sigma) à 1,2 cm (bêta, upsilon). La forme des lettres est celle de la majuscule nubienne. Le lapicide utilise les nomina sacra et d'autres abréviations, mais aussi des signes diacritiques propres de la majuscule nubienne (pour plus de détails, voir apparat paléographique).

D'après la pierre à Braunsberg, W. Weißbrodt, « Ein aegyptischer christlicher Grabstein mit Inschrift aus der griechischen Liturgie im Königlichen Lyceum Ho-sianum zu Braunsberg und ähnliche Denkmäler in auswärtigen Museen », erster Teil: Verzeichnis Braunsberg, Winter-Semester 1905/6, zweiter Teil: Verzeichnis Braunsberg, Sommer-Semester 1909: avec la photo, transcription diplomatique et commentaire exhaustif (Lefebvre, Recueil, no. 666; S. de Ricci, CRAI 1909, p. 156-160, no. 5; F. Preisigke, SB I 5716; Tibiletti Bruno, Iscrizioni nubiane, no. 15). D'après la pierre au Musée National de Varsovie, A. Sadurska, « Epitafium greckie z XII w. w Muzeum Narodowym w Warszawie » (« L'épitaphe grecque du XII s. au Musée National de Varsovie »), RMNW 3 (1958), p. 173-179, photo: en polonais avec résumé en français. D'après la pierre au Musée National de Varsovie, Kubińska, Faras IV, p. 51-52, no. II, fig. 14.

Cf. W. Weißbrodt, « Ein ägyptischer christlicher Grabstein mit Inschrift aus der griechischen Liturgie », Pastorblatt für die Diözese Ermland, Braunsberg 1905 (description de la pierre, traduction allemande de l'inscription, discussion de la prière). J. Oats, JEA 49 (1963), p. 163, no. 9 (bibliographie). V. Grumel, Byzantion 35 (1965), p. 85, note 2 (sur la date). R. S. Bagnall, K. A. Worp, CdÉ 61 (1986), p. 347-357, no. 6. A. Łajtar, ZPE 113 (1996), p. 106, no. 14 (bibliographie); idem, ZPE 125 (1999), p. 162-163, no. 124 (bibliographie).

21 février 1173 ap. J.-C.

Dans la présente édition, les lettres visibles sur la pierre au temps de l'editio princeps et aujourd'hui inexistantes sont en caractères gras

€ w€ e)n o)no/ mati tou= p(at)r(o\)j (kai\) to [u(flo)u=] (kai\) tou= a( u pn(eu/mato)j, )mh/n:

4       o( q(eo\)j tw=n pn(eum)a/ twn e( (kai\) pa/shj e( sar ,

o( to\n qa/nato n katargh/saj (kai\) n

údhn katapa h/saj e( (kai\) zwh\n ko/s-m%e( xarisa/men j, e( )na/pa on to\n d(ou=lon)

8       )Ihsou u(flo\)j Mariamh\ o/lpoij )A-braa\m e( (kai\) )Isa\ )) akw/b, e)n tw/

<p> tohl xolh

 [)pe/]dra

12      mo/j:

 par' au)tw=

lo/gon h)/ e)/rgwn

a\ dia/nia (kai\) i)la/n(qrwp)oj

16      ti ou)k e)/stin a)/n(qrwp)oj

 (kai\) ou)x o(martu/sei:

su\ ga\r [mo/n]oj, q[(eo/)j, a(]marti/aj e)k

to\j u(pa/rxeij (kai\) h( di(kai)osu/nhj{j}

20sou di(kai)osu/nhj ei)j to\n ai)w=na(kai\) (?) o( lo/goj sou )lh/qeia: su\ ga\r h(

)na/pauson [to\]n [d(ou=lon)] )Ihsou u(flo\)j Maria-mh\ (kai\) su\ th\n [do/]ja )nape/lpo{n}-24 men tou= p(at)r(o\)j (kai\) tou= u(flo)u= pn(eu/mato)j.e)/ti th=j zwh=j au)tou= Ø

p, )po\

-

mart(u/rwn) wpqÄ, Fameno\q ke,

selle/n$  ? Ä. )na/pauson.?

- -e(-- e( d

2. pr! S|| 3. S pn! amhn || 4. q! pnatwn S || 5. S || 6. S || 7. anapau[!]on ton|- -- 8. i+h • !ou u! || 8-9. abra • am S || 9-10. entwtofw || 15. S i)lano[!] || 16. ano! || 17. S || - --19. S hdiSo!unh!! || 20. diSo!unh! || 21. S(?) || 22. i+h!ou || 23. S || 24. pr! S uu pn! || t 26. mar 8. Øuo Weißbrodt || 9. lire )Isaa/k ...... 9-10. en tw tufw parad (?) Weißbrodt avec la notice: « Z. 10 vielleicht tofw statt tufw zu lesen", lire e)n to/p%fwtein%= || 10. lire to/p%xlo/hj || 11. lire to/p%)nacu/jewj e)/nqa || 12. lire lu/ph ...... 13. lire a(ma/rthma par' au)tou= || 14. lire praxqe\n h)/ lo\g%h)/ e)/rg%|| 15. « Durch den senkrechten Strich Z. 15 deutet der Steinmetz an, hkatadiania (d.i. h)/ kata\ - dia/noian) gehöre vor agaqo!» Weißbrodt, lire dia/noian | i)lan e Weißbrodt || 16. - anq! Weißbrodt || 17. lire a(marth/sei || 19. lire dikaiosu/nh || 20. lire dikaiosu/nh || 22. anapau!on ? ?n i+h!ou Øue Weißbrodt, lire )na/pausij tou= dou/lou || 23. lire soi/, do/jan || 23-24. lire )nape/mpomen ou )name/lpomen || 24. lire t%= patri\ kai\ t%= ufl%= kai\ t%= a(gi/%pneu/mati || 25. lire e)/th || 26. fameno! Weißbrodt, lire - Famenw/q || 27. kj Weißbrodt | lire selh/n$

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, amen. Dieu des esprits et de toute chair, qui as aboli la mort et foulé aux pieds l'Hadès et as donné la vie au monde, accorde le repos à ton serviteur Iésou fils de Mariamé dans le sein d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, dans le lieu de lumière du paradis, dans le lieu de verdure, dans le lieu de rafraîchissement, là d'où a disparu la peine, le chagrin et le gémissement. Remets tous les péchés commis par lui ou par la parole, ou par l'action, ou par la pensée, parce que tu es bon et bienveillant, car il n'y a pas d'homme qui vivra et ne péchera pas. Tu es seul en dehors du péché et ta justice (est) justice pour les siècles et ta parole (est) vérité. Tu es le repos de Iésou, fils de Mariamé et nous te glorifions Père et Fils et le Saint Esprit. Les années de sa vie (étaient) 80. (Il est mort dans l'année) après des Martyrs 889, (dans le mois) Phamenôth 25, le [..] jour de la lune. (Dieu), accorde le repos.

L'épitaphe de Iésou fils de Mariamé appartenait à un groupe jadis homogène de quelque 40 épitaphes provenant de tout le territoire de la Nubie, de Dendur au nord à Soba au sud; cf. la liste de ces épitaphes avec les données bibliographiques dans: A. Łajtar, ZPE 113 (1996), p. 104-108; dans le présent catalogue, outre l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé, ce groupe est représenté par les inscriptions nos. 109-111. Les plus anciens exemplaires de ce groupe, découverts par la mission archéologique polonaise au Vieux Dongola sont datés de la seconde moitié du VIII siècle (numéros 28 et 29 de la liste mentionnée ci-dessus), l'exemplaire le plus récent, provenant aussi de Dongola, date de 1257 (épitaphe de Iésou, prêtre et archistablitès, inédite). L'élément essentiel de ces épitaphes qui permet de déterminer l'appartenance à ce groupe est la longue prière pour le défunt (la défunte) placée généralement au début du texte. Parfois seulement cette prière est précédée d'une formule trinitaire (e)n o)no/mati) ou d'une invocation. Les différentes épitaphes appartenant à ce groupe contiennent de nombreuses variantes grammaticales et orthographiques de la prière, dues avant tout à la spécificité du grec nubien. On n'observe pas par contre de variantes sémantiques importantes. En nous basant sur la confrontation des exemplaires connus de la prière, nous pouvons reconstituer son textus receptus comme suit: o( qeo\j tw=n pneuma/twn kai\ pa/shj sarko/j, o( to\n qa/naton katargh/saj kai\ to\n údhn katapath/saj kai\ zwh\n t%= ko/sm%xarisa/menoj, )na/pauson th\n cuxh\n tou= dou/lou sou tou= dei=noj e)n ko/lpoij )Abraa\m kai\ )Isaa\k kai\ )Iakw/b, e)n to/p%fwtein%=, e)n to/p%xlo/hj, e)n to/p%)nacu/-jewj, e)/nqa )pe/dra o)du/nh kai\ lu/ph kai\ stenagmo/j. pa=n a(ma/rthma par' au)tou= praxqe\n lo/g%h)/ e)/rg%h)/ kata\ dia/noian, ...j )gaqo\j kai\ i)la/nqrw-poj, sugxw/rhson, o(/ti ou)k e)/stin a)/nqrwpoj ˘j zh/setai kai\ ou)x a(mar-th/sei: su\ ga\r mo/noj, qeo/j, pa/shj a(marti/aj e)kto\j u(pa/rxeij kai\ h( dikaio-su/nh sou dikaiosu/nh ei)j to\n ai)w=na, ku/rie, kai\ o( lo/goj sou )lh/qeia: su\ ga\r ei)= h( )na/pausij kai\ h( )na/stasij tou= dou/lou sou tou= dei=noj kai\ soi\ th\n do/jan )nape/mpomen t%= patri\ kai\ t%= ufl%= kai\ t%= a(gi/%pneu/mati nu=n kai\ )ei\ kai\ ei)j tou\j ai)w=naj tw=n ai)w/nwn, )mh/n. Après le texte de la prière viennent les données concernant le défunt et la date de sa mort. Dans quelques cas, cette séquence du texte suivie d'une petite prière pour le défunt.

La prière o( qeo\j tw=n pneuma/twn kai\ pa/shj sarko/j est connue dans l'Église orthodoxe grecque comme élément de la liturgie funéraire et elle était transmise comme telle dans la tradition manuscrite des eucologes byzantins. Le plus ancien eucologe contenant cette prière est Vat. Barb. gr. 336 provenant d'Italie du sud et daté du milieu du VIII siècle; cf. S. Parenti, E. Velkovska, L'Eucologio Barberini Gr. 336 (ff. 1-263) [= Bibliotheca «Ephemeridis Liturgicae » «Subsidia » 80], Roma 1995. La prière dans sa version byzantine diffère de la version nubienne par deux points, à savoir: à la place de to\n údhn katapath/saj elle a to\n dia/bolon katapath/saj; en plus, elle ne contient pas la prière pour le repos de l'âme du défunt dans le sein d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Sous l'influence de l'Église byzantine la prière «Dieu des esprits et de toute chair » a passé dans la liturgie funéraire des Arméniens et des Slaves en versions linguistiques respectives (en arménien et envieux slave). Elle apparaît aussi dans la liturgie funéraire de l'Église éthiopienne. Cependant, en dehors de la Nubie, elle n'a jamais été inscrite sur des pierres funéraires.

Il est probable que, comme c'était le cas dans l'Orient chrétien, en Nubie aussi la prière o( qeo\j tw=n pneuma/twn kai\ pa/shj sarko/j faisait partie de la liturgie funéraire et était habituellement transmise au moyen de livres liturgiques. Les rédacteurs d'inscriptions funéraires, qui se recrutaient sans doute essentiellement parmi les prêtres, soit puisaient directement les textes dans des eucologes, soit citaient de mémoire la prière qu'ils entendaient et répétaient souvent pendant des offices. Il est par ailleurs impossible d'exclure l'existence de moyens intermédiaires de transmission de textes, p.ex. copies d'après les eucologes effectuées par des particuliers ou autres moyens semblables. Le texte de la prière adapté pour les besoins des épitaphes a pu aussi être copié sur les inscriptions plus anciennes. Le processus de transmission du texte de la prière o( qeo\j tw=n pneuma/twn kai\ pa/shj sarko/j dans la Nubie chrétienne tel que nous venons de présenter a dû aboutir à la formation de groupes d'inscriptions manifestant certains traits caractéristiques identiques ou similaires «hérités» de la source com-mune. Pour ce qui est du texte de la prière, l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé forme un groupe avec trois autres épitaphes:

1) épitaphe de Goassi, fils de Sentiko(l), 1161 ap. J.-C.; trouvée à Meinarti aux environs de la deuxième cataracte (U. Monneret de Villard, La Nubia Medioevale I, Le Caire 1935, p. 219; J. W. B. Barns, Kush 2 (1954), p. 26-27, no. 3726, pl. V a.);

2) épitaphe de Papasa, un prêtre et Choiakishshi(l), 1181 ap. J.-C.; provenance inconnue (publication la plus récente: É. Bernand, IÉgLouvre, no. 115, pl. 67);

3) épitaphe d'une femme nommée Eikkir, entre 1083 et 1184 ap. J.-C.; trouvée à Ashkeit aux environs de Wadi Halfa, dans la région de la deuxième cataracte (J. W. Barns, Kush 2 [1954], p. 28-29, no. 3727, pl. V b).

Les similitudes textuelles entre ces quatre épitaphes sont très profondément discutées dans A. Łajtar, «Varia Nubica X» (en préparation); cf. aussi infra, commentaire des différentes lignes du texte. Il convient en outre de souligner que les quatre épitaphes sont gravées sur des supports très similaires; il s'agit en effet de plaques de grès aux dimensions rapprochées, avec un champ épigraphique en creux. Tous ces monuments sont datés du XII siècle et, plus précisément, du milieux du XII siècle (dans l'épitaphe d'Eikkir il ne subsiste dans le numéral que le «v»).

8.         )Ihsou u(flo\)j Mariamh/ semble être un nom de personne. Une telle interprétation s'impose après l'examen de la juxtaposition bien singulière des deux noms. Elle est aussi étayée par le fait que, dans les épitaphes de la Nubie chrétienne, on n'a point noté jusqu'à présent de filiation exprimée au moyen du nom de la mère. Selon toute vraisemblance, ÉIhsou est une forme nominale du type nubien et non pas un cas oblique grec (génitif ou datif) ou une erreur du rédacteur ou du lapicide; sur les formes nominales nubiennes terminées par -ou, voir commentaire de l'inscription 109, ll. 7-8. Le point sur le « h» dans e( i+h!ou sert sans doute à signaler un accent. Si tel est le cas, la position de cet accent ne correspond pas à celle qui apparaît couramment en grec dans le nom Jésus, ce qui permet de penser qu'il s'agit là de l'accentuation typique du e( vieux nubien. La même remarque concerne le nom d'abraam dans les lignes 8-9. À titre de comparaison, il est intéressant de signaler qu'en polonais contemporain, tout comme dans l'inscription étudiée, les noms « Jésus » et « Abraham » sont paroxytons.

9-10.L'expression e)n to/p%fwtein%= a subi ici une très importante transformation dûe très vraisemblablement à l'haplographie et à la ressemblance entre le « t» et le « p». Dans les autres épitaphes du groupe auquel appartient l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé on trouve à cet endroit du texte: entwtofwtinon (Goassi), entwfwtinon (Papasa), entwpofwtinon (Eikkir). La suite: parad(ei/sou) n'apparaît que dans l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé.

10.       Dans les épitaphes du groupe étudié, l'expression e)n to/p%xlo/hj revêt la forme suivante: entwplxolh (Goassi), en twhlxolh (Iésou fils de Mariamé), entwoxlei (Papasa), en twpxwlh (Eikkir). Cette forme est dûe avant tout à la métathèse du «o» et du « l». Il est très probable que twhl dans l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé a été formé sur twpl à cause d'une forte ressemblance entre le « p» et le « h». Dans ce passage, les épitaphes de Goassi et de Iésou fils de Mariamé seraient donc identiques. L'épitaphe d'Eikkir se rapproche de ces deux textes.

)napu/jew! pour )nacu/jewj aussi dans les épitaphes de Goassi, de Papasa et d'Eikkir.

11-12.Les épitaphes de Goassi, de Iésou fils de Mariame et de Papasa ont kai/ avant o)du/nh à la différence du textus receptus de la prière aussi bien dans la version nubienne que byzantine. Toutes les trois contiennent une forme bien étrange olubh pour lu/ph qui n'est attestée nulle part ailleurs. Le « o » dans cette forme est soit un artcile, d'ailleurs incorrect, soit une prothèse. Le « b» pour le « p» est commun.

13.       par' autw pour par' au)tou= n'est visiblement pas un phénomène syntaxique (datif à la place du génitif) mais bien orthographique; en effet, dans le grec tardif les « w » et « ou» primitifs étaient prononcés comme le /o/ fermé, d'où leur fréquente interversion à l'écrit, surtout dans les terminaisons; cf. Gignac, Grammar I, p. 208-211. L'orthographe par' au)tw= au lieu de par' au)tou= est répandue dans les épitaphes nubiennes du type étudié ici; cf. p.ex. l'épitaphe de Stéphanos, infra, no. 109, ll. 13-14.

Le participe praxqe/n prend dans les épitaphes de Goassi et de Papasa la forme parxqen, alors que dans l'épitaphe d'Eikkir la forme paaxqen (pour pa<r>axqen ?). Nous avons affaire dans ce cas soit à une métathèse soit à une anaptyxe, peut-être aussi à l'attraction de la préposition para/.

14-15.Ce passage du texte est particulièrement frappant quand on cherche à établir la parenté entre les quatre épitaphes (Iésou fils de Mariamé, Goassi, Papasa et Eikkir). Dans les quatre textes )gaqo/j de l'expression ...j )gaqo\j kai\ i)la/n-qrwpoj a été inseré entre ergon/ergwn (pour e)/rgƒ) et hkatadiania. Dans l'épitaphe de Papasa, le rédacteur (ou le lapicide) a remarqué cette erreur et a répété toute l'expression. Dans l'épitaphe de Iésou fils de Mariamé, le trait vertical après agaqo! semble indiquer que le lapicide était conscient du fait qu'à cet endroit du texte ce mot n'était pas à sa place. Les formes logwn, er-gwn, dianoia (pour lo/gƒ, e)/rgƒ, dia/noian) sont courantes dans les épitaphes nubiennes renfermant la prière o( qeo\j tw=n pneuma/twn kai\ pa/shj sarko/j; cf. commentaire de l'inscription 109, ll. 13-14.

17.       Le «o» dans omartu!ei semble certain. Il ne se laisse pas expliquer autrement que par l'erreur du lapicide. Le « u» pour le « h» est l'effet du iotacisme. On le retrouve dans les trois autres épitaphes du groupe (bien que dans celle de Papasa figure à cet endroit amartua!).

18-19.L'adjectif pa/shj a été omis dans l'expression su\ ga\r mo/noj, o( qeo/j, pa/shj a(marti/aj e)kto\j u(pa/rxeij. Des cas analogues dans les épitaphes de Goassi, Papasa et Eikkir.

19-20.Le « !» apparaît aussi à la fin du mot dikaiosu/nh dans les épitaphes de Goassi et d'Eikkir; di(kai)o!unh!!!ou dans l'épitaphe de Iésou-fils-de-Mariamè est une dittographie.

À la fin de la ligne il faudrait peut-être lire su\ ga\r <h)=> h( (pour su\ ga\r <ei)=> h(): il s'agit là d'une haplographie.

)na/pauson pour )na/pusij est une erreur évidente faite soit par le rédacteur de l'inscription soit par le lapicide. En effet, il a écrit automatiquement la forme la plus répandue dans les épitaphes de Nubie et la plus connue dérivée de la racine )napau-.

23-24. )nape/lpo{n}men est une contamination de )nape/mpomen et )name/lpomen.

24.       La doxologie finale est construite au génitif et non pas, comme nous pourrions nous y attendre, au datif. En plus, après kai\ tou= uflou= ont disparu les mots kai\ tou= a(gi/ou, sans doute par haplographie. Dans les épitaphes de Goassi et de Papasa, la doxologie prend la forme identique, à cette différence que dans l'épitaphe de Goassi on note une autre haplographie: to<u=> u(flo)u=. Il n'y a pas de doxologie dans l'épitaphe d'Eikkir. -)

27.       Compte tenu de l'état actuel de la pierre la lecture de Weißbrodt (!ellenh kj est difficile à vérifier. Elle donne en effet un écart de six jours entre les données contenues dans cette ligne et les données réelles: selon le cycle alexandrin, en mars 1173, la néoménie tombait le 19 mars; le 21 mars était donc le troisième jour du mois lunaire. La lecture !elle/n$ gÄ n'est pas impossible.

[A.Ł.]


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