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65. DÉDICACE DE PATOUBASTHIS, FILS D'APOLLONIOS

Département de l'Art antique, inv. 141255.

Selon Jouguet, trouvée dans le tell d'Edfou par les sébakhin, restée pendant un temps entre les mains des gardiens du temple. À la veille de la seconde guerre mondiale, Kazimierz Michałowski, co-directeur des fouilles franco-polonaises à Edfou dans les années 1936-1939 a fait venir la pierre à Varsovie comme don du directeur de l'IFAO (Institut Français d'Archéologie Orientale au Caire) en reconnaissance du concours apporté par la mission polonaise aux fouilles d'Edfou. Abritée d'abord au Musée de l'Université de Varsovie, puis au Musée National de Varsovie.

Grès. Haut d'une stèle; h. 26,8 cm, l. 40 cm, ép. 7,7 cm. La forme de la stèle reproduit en grandes lignes celle d'une façade de temple mais sans le décor caractéristique. Une épaisse moulure convexe longe les arêtes latérales de la stèle et « coupe » la pierre à peu près à la mi-hauteur du fragment conservé. Au-dessus de la moulure figure une corniche sans décor sur laquelle, au centre, là où normalement on représentait un disque solaire ailé, se trouve un rectangle (le lapicide a peut-être laissé ce rectangle avec l'intention de le retravailler ensuite en disque solaire mais il ne l'a jamais fait). Au-dessus la corniche figure un listel plat (à cet endroit se trouvait traditionnellement une frise). En haut de l'espace délimité par la moulure convexe se trouve un signe hiéroglyphique stylisé nb = « or » au-dessous duquel figure l'inscription. Gravure peu profonde et peu soignée rappelle le graffito. H. des lettres 0,6 - 1,2 cm.

D'après la pierre en Égypte, P. Jouguet, Annuaire de l'Institut de philologie et d'histoire orientales 3 (1935), p. 243, no. 7, pl. 4, avec la correction d'H. Grégoire (Crönert, SEG VIII 774; Bilabel SB V 7694). D'après Jouguet et la photo, A. Bernand, IPortes, no. 112, pl. 67, 1-2. D'après la pierre au Musée National de Varsovie, A. Twardecki dans: Tell Edfou soixante ans après. Actes du colloque franco-polonais, Le Caire 15 octobre 1996 [= Fouilles franco-polonaises 4], Le Caire 1999, p. 87-88, no. 5, fig. 6 à la p. 92. D'après la pierre, A. Twardecki dans: XI Congresso Internazionale di epigrafia Greca e Latina, Roma 1999, p. 745. D'après la pierre au Musée National de Varsovie, A. Łukaszewicz, « La stèle de Patoubasthis et les vaches sacrées à Edfou », JJP 29 (1999), p. 75-78.

Cf. É. Bernand, REG 98 (1985), p. 393 (compte rendu de IPortes, no. 112, remarques sur la lecture). SEG XXXIV 1557 (compte rendu de IPortes, no. 112). A. Łajtar, ZPE 125 (1999), p. 158, no. 68 (bibliographie). J. Bingen, Bull. épigr. 1999, 720 (sur la publication de Łukaszewicz dans JJP 29; il propose de reconnaître le mot boutafh/ avec le sigma parasitaire).

I - II s. ap. J.-C., d'après la paléographie.

Patouba/sqij )Apollwni/ou qulour(o\j)

 bou{s}tafh=j qew=n megi/stwn u(pe\r?? e?u)?-

[x ? ? ? ? ?]  ? ? ?[ - - - ]

1. Patou=basqij Twardecki; lire qurwro/j || 1-2. qulour...k?ouj Jouguet, Twardecki, culour...-g???o/j A. Bernand || 2. bouj tafh=j ou= suggéré par Grégoire et accepté par Bilabel, culour...gŁukaszewicz bou{s}tafh=j Bingen; A. Bernand et Twardecki, qui le suit, mettent une virgule après tafh=j || 2-3. eu)...[xh=j Jouguet, Bernand, Łukaszewicz, eu)...[xh\n Twardecki || 3. Jouguet hésite entre - - mi!? - - et - - mio? - -, chez Twardecki: ..]mi??[ ...

Patoubasthis fils d'Apollonios, portier des sépultures des bovins des Dieux très grands (a érigé) pour [...].

2.         Dans les sources grecques d'Égypte, le mot tafh/ désigne avant tout la momie. Quand il se réfère à une sépulture il s'agit toujours d'une sépulture d'animaux sacrés; cf. G. Wagner, ZPE 106 (1995), p. 124 qui cite O.Pr.Joachim 2, 2; 3, 2, 11; 4, 1 etc. Le composé boutafh/ n'est attesté que dans cette inscription, mais on connaît bouta/fion qui est le nom d'un a)/mfodon à l'Arsinoïte, attesté dans BGU IV 1087 V 6, dont le nom vient sans doute du nom d'un édifice situé dans son enceinte. boutafh\ qew=n megi/stwn de notre inscription était un lieu où l'on ensevelissait les animaux sacrés: vaches et boeufs. Quant à l'architecture, il faudrait vraisemblablement le rapprocher d'autres sépultures animales égyptiennes, telles que le Sarapeum à Memphis ou le Bucheum à Hermonthis, sous forme de galerie souterraine donnant accès à des sépultures individuelles, chambres funéraires ou niches. L'entrée de la galerie était fermée par une porte sur laquelle veillait à un moment, en qualité de portier, Patoubasthis, fils d'Apollonios. Aucune source antique, ni égyptienne ni classique, ne mentionne le culte des vaches ou boeufs sacrés à Apollonopolis Magna. A. Łukaszewicz, op. cit. p. 78, pense qu'il s'agit là des vaches sacrées de la déesse Hathor de Dendera qui était étroitement liée à Horus d'Edfou.

L'orthographe bouºtafh! (avec «º») est vraisemblablement une erreur du rédacteur de l'inscription ou du graveur qui, dans la forme composée, répéta automatiquement la forme du nominatif du premier élément.

2-3.Tous les éditeurs de l'inscription restituaient u(pe\r eu)...[xh=j (eu)...[xh\n), alors qu'en réalité, la formule u(pe\r eu)xh=j apparaît assez rarement dans les inscriptions grecques d'Égypte. On la retrouve uniquement dans IPortes, no. 91 (dédicace des gens d'Émèse à Koptos, 9 juin 316), dans l'inscription chrétienne SB XII 11100, et peut-être aussi dans Breccia, Iscrizioni, no. 533. La formule qui revient beaucoup plus souvent c'est u(pe\r eu)xaristi/aj (cf. p.ex. IAlexImp, nos. 73, 77, 82; IDelta, p. 85; IFayoum II, no. 126 et III, no. 154; SB I 1987a [d'Oxyrhynchos]; IAkoris, nos.18 et 25; IThSy, no. 328). Il est donc très probable qu'à cet endroit du texte il faut restituer justement cette dernière formule.

[A.T.]


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