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42. DOSSIER CONCERNANT LE GYMNASE D'OMBOI

Département de l'Art antique, inv. 198817.

Lieu et contexte de la découverte inconnus. Parvenu à la collection du Lyceum Hosianum à Braunsberg avant 1913 (no. d'inv. 958), depuis 1947 au Musée National de Varsovie. Le texte de l'inscription indique que le monument vient d'Omboi (Ombos), aujourd'hui Kôm Ombo, en Haute Égypte.

Granit noir à grain fin. Plaque épaisse; h. 28 cm, l. 39,5 cm, ép. 13,5 cm; il ne subsiste que la partie centrale (?) de la plaque; aucun des bords n'est original; la surface de la pierre effacée au centre. Lettres gravées sans réglage mais avec soin. Le nom de Cléopâtre III dans les lignes 12 et 16 martelé. Il en est probablement de même du nom de Ptolémée VIII Évergète (cf. commentaire). Alpha à barre horizontale ou à barre en arceau; omicron un peu plus petit que les autres lettres, le trait droit dans le pi légèrement plus cour que le gauche, les traits extérieurs du sigma sont soit horizontaux soit légèrement obliques. H. des lettres: 0,7 - 0,9 cm, h. moyenne d'interligne: 0,3 - 0,4 cm.

D'après la copie de F. Hiller von Gaertringen et W. Schubart, U. Wilcken, « Ein Gymnasium in Omboi », AfP 5 (1913), p. 410-416 (F. Schroeter, De regum hellenisticorum epistulis in lapidibus servatis quaestiones stilisticae, Leipzig 1932, p. 82-83, nos. 37-38: seulement lignes 12-18; M. Th. Lenger, Corpus des ordonnnances des Ptolémées, Bruxelles 1964 (2 édition, Bruxelles 1980), p. 117-119, nos. 48-49: seulement lignes 12-18; A. Bernand, IThSy, Paris 1989, p. 129-131, no. 189; A. Bernand, IProse, no. 21, vol. I, p. 59: texte et traduction, vol. II, p. 58-60: commentaire).

Cf. A. Łajtar, ZPE 125 (1999), p. 156, no. 46 (bibliographie). B. Legras, Néotês. Recherches sur les jeunes grecs dans l'Égypte ptolémaïque et romaine [= Hautes études du monde gréco-romain 26], Genève 1999, p. 212-214 et 225 (résumé de l'inscription, sur les néaniskoi).

La réponse des souverains aux membres du gymnase d'Omboi (et l'ordre d'exécution adressé au stratège de la Thébaïde Boéthos) est datée du 22 avril 135 av. J.-C. (le 29 Gorpiaios, le 29 Phamenôth de l'an 35 du roi Ptolémée VIII); la décision des néaniskoi d'Omboi a dû être prise plus tard, l'inscription fut gravée quelque temps après cette décision.

[ - - - - - - - - - - -]asai au)to\ x ?

[ - - - - - - - - - - ] [ - - - - - - - -]n kaq' ∂n e)/xousa x4? ? ? ? ? ? ??[ ? ? ? ? ? ?

[ ]asa ] [ - - - - - - - -)]jiou/menon kai\ d? [ ? ? ? ? ? ? ? ?

?]me/nhj e)pisto[lh=j] 4 [ - - - - - - - - ]nai e)f' oÂj kai\ tou ? ? ? ? ?e[ ? ? ?]jato th\n tw=n e [ - - - kalw=]j d' e)/xontej kai\ to\ geg[ono\j] para\ twp ????

rifane [ ---dedo/xqai ---?t]oi=j neani/skoij )nag[r]a/[c]ai to\ ch/i)sma tou=t[o] [kai\ th\n para\ tw=n basile/wn e)pistolh\n th\]n peri\ tou/twn ei)j sth/-l[h]n li[qi/n]hn tou= gei/tonoj e[ - - - ] 8 [ ---kai\ )nate]q?

h=nai tau/thn e)n tw=i gum[nasi/wi par]a\ t$= e(stame/-nh[i] [ ---ei)ko/ni ---]ou prw/tou i)/lou kai\ kti/stou tou= gumnasi/ou,

o(/pwj t ? [ - - - - - - - ]i? para\ tw=n semnota/twn basile/wn )pomnhmoneu/[h]-[tai ei)j ëpanta xro/non. ] wacat

12 [_basileu\j Ptolemai=oj kai\´ basi/]lissa Kleopa/tra h( )delfh\ _kai\ basi/lissa Kleopa/tra h( gunh\´ [toi=j e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/o]u xai/rein. )Alkima/xou kai\ Qemis-tokle/ouj tw=n par' u(mw=n )podo/[n]-[twn h(mi=n th\n u(me/teran e)/nteujin] pro\j Bo/hqon to\n suggenh= kai\ strathgo\n th\n u(pokeime/nh[n] [e)pistolh\n e)gra/camen.] wacat e)/rrwsqe. (e)/touj) leÄ Gorpiai/ou kqÄ Famenw\q kqÄ. wacat 16 [_basile/u\j Ptolemai=oj kai\´ bas]i/lissa Kleopa/tra h( )delfh\ _kai\ basi/lissa Kleopa/tra h( gunh\´ [Boh/qwi tw=i )delfw=i xai/rein. ∏j e)/gracan] h(mi=n e)pistolh=j ofl e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/ou [u(poteta/xame/n soi to\ )nti/grafon. kalw=j oÔn poih/seij -------] toi=j eis? ? ?? ? ?

l[ - - - ]

Toutes les restitutions semblable, datés de l'époque ptolémaïque: IPhilae I 19 vers l'an 117 av. J.-C. (une requête des prêtres de Philae adressée aux souverains, la réponse du roi et de ses deux épouses, le rescrit adressé par les souverains à Lochos, stratège et épistratège de la Thebaïde) et IThSy 244 de l'an 115 av. J.-C. (dix textes concernant les privilèges accordés aux prêtres de Chnoum à Éléphantine; sur cette inscription voir récemment G. Dietze, « Der Streit um die Insel Pso. Bemerkungen zu einem epigraphischen Dossier des Khnum-tempels von Elephantine», Anc. Soc. 26 [1996], p. 157-184).

6.         Pour les généralités sur les néaniskoi voir G. Sacco, « Sui neani/skoi dell'età ellenistica», RFIC 103 (1979), p. 39-49; quant aux néaniskoi dans l'Égypte gréco-romaine voir Legras, op. cit., p. 195-217. Les néaniskoi était une institution panhellénique attestée uniquement pour la période hellénistique. Il s'agissait de jeunes Grecs issus de bonnes familles qui faisaient leur service militaire, préparaient une carrière de magistrat et fréquentaient le gymnase, à côté d'éphèbes et d'anciens éphèbes. Les néaniskoi du gymnase d'Omboi formaient une association (ou société) dont les résolutions ou décisions (pséphismata) de-vaient être acceptées par les autorités du royaume; sur la notion de pséphisma voir F. Quaß, Nomos und Psephisma. Untersuchung zum griechischen Staatsrecht [= Zetemata 55], München 1971, passim, surtout p. 2-5 et 23-44. Les néaniskoi de notre inscription formaient un groupe, vraisemblablement le plus important, de ofl e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/ou. Wilcken, op. cit., p. 414, envisageait aussi la restitution: [ - - - dedo/xqai toi=j te e)fh/boij kai\ t]oi=j neani/skoij.

8.         Avant les termes prw/tou i)/lou kai\ kti/stou tou= gumnasi/ou on attendrait le nom de la personne au génitif. prw/toj i)/loj ne peut donc pas être ici un titre d'honneur (si c'était le cas, on aurait tw=n prw/twn i)/lwn) mais désigne bien l'appartenance réelle de l'homme au cercle des hetairoi du roi. Cette information permet de situer la vie et l'activité du personnage (et par cela même la création du gymnase à Omboi) au III s. av. J.-C. Notre inscription confirme ainsi un fait bien connu par ailleurs, à savoir le caractère privé de l'institution du gymnase dans le monde hellénistique.

Le martelage des noms de Ptolémée VIII Évergète et de sa seconde épouse Cléopâtre III à cet endroit du texte et à la ligne 16 a certainement été effectué pendant la guerre civile des années 131-124 av. J.-C., lorsque les deux souverains furent obligés de quitter l'Égypte où seule resta au pouvoir la première épouse du roi, Cléopâtre II.

Les destinataires de la lettre du roi peuvent être identifiés avec certitude grâce à la ligne 17. En effet, il s'agit des ofl e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/ou. L'ex-pression ofl e)k tou= gumnasi/ou désigne ici les personnes fréquentant alors l'établissement; formule semblable dans M. L. Strack, AfP 2 (1903), p. 548, no. 26 (dédicace de la période ptolémaïque dont les auteurs sont les gum[nasia/r-xoj] kai\ ofl e)k tou= gumna[si/ou]) et, vraisemblablement, dans P. Oxy. II 257, 21 (grafh=i tw=n e)k tou= gumnasi/ou; 4/5 ap. J.-C.). Les ofl e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/ou forment un corps qui entreprend officiellement un échange de correspondance avec le roi, lui adresse une pétition par une délégation et re-çoit une réponse rédigée par les souverains. Il n'existe aucun rapport entre les ofl e)k tou= gumnasi/ou et les ofl )po\ tou= gumnasi/ou (membres de l'aristocratie urbaine) qui apparaissent dans les sources seulement au temps de l'Empire romain.

Les ambassadeurs Alkimachos i Thémistoklès furent chargés de mission auprès du roi par les ofl e)k tou= e)n )/Omboij gumnasi/ou. Peut-être s'agit-il des néaniskoi. Les deux hommes ne se laissent pas identifier de manière absolument certaine avec les personnes portant les mêmes noms, connues par d'autres sources. A. Bernand, IThSy, no. 189 a fait un rapprochement entre Alkimachos de notre texte et )Alki/maxoj Kolofw/nioj mentionné dans une inscription de Samos laquelle contient une liste de soldats au service dans les armées ptolémaïques (L. Robert, Études épigraphiques et philologiques, p. 114, l. 5), alors que Thémistoklès, lui, a été confronté à titre d'hypothèse à un certain Qemistoklh=j au)lhth/j qui a gravé son nom au Memnonion d'Abydos (Perdrizet-Lefebvre, Memnonion, no. 531). Toutefois, tous ces rapprochements s'appuient sur des arguments beaucoup trop fragiles pour que nous puissions les admettre.

Pour Boéthos, voir dernièrement: H. Heinen, « Der kti/sthj Boethos und die Einrichtung einer neuen Stadt », Teil II, AfP 43 (1997), p. 340-363. On sait qu'au moment où l'inscription fut érigée, Boéthos, qui était épistratège, occupait parallèlement, depuis au moins deux ans, la charge de stratège de la Thébaïde. Or, l'inscription ne mentionne que la fonction de moindre importance, celle de stratège. H. Heinen, op. cit., p. 346, explique cette anomalie par le fait que l'affaire faisant l'objet de l'inscription relevait des compétences du stratège de la Thébaïde et non pas de celles de l'épistratège et qu'il n'était donc pas nécessaire de mentionner l'autre dignité de Boéthos, même si celle-ci était plus importante dans la hiérarchie administrative de l'État ptolémaïque.

Dans la lettre des souverains, l'indication de la date du jour est donnée selon le calendrier macédonien et égyptien, le calendrier macédonien ayant été assi-milé au calendrier égyptien (ce qu'il en reste, ce sont les noms des mois alors que le système est celui du calendrier égyptien). L'assimilation du calendrier macédonien et égyptien s'est en fait opérée en deux étapes; cf. A. E. Samuel, Ptolemaic Chronology [= Münchener Beiträge zur Papyrusforschung und antiken Rechtsgeschichte 43], München 1962, p. 129-138. Le texte étudié constitue le témoignage de la première étape où le Dystros macédonien correspond au Thoth égyptien et ensuite les mois se suivent selon une chronologie normale, de manière que Gorpiaios correspond à Phamentoth. Samuel, op. cit., p. 130, recueille 21 témoignages papyrologiques et épigraphiques de cette étape, tous datés de la période 202/1 av. J.-C. - 103/2 av. J.-C., qui s'accumulent dans les années soixante du II s. av. J.-C. Notre inscription est absente de cette liste.

18.       Pour le supplément cf. p.ex. SIG3 664, ll. 11-13: u(poteta/xamen de/ soi kai\ tou= e)nexqe/ntoj u(p' au)tou= do/gmatoj to\ )nti/grafon (Délos, 164 av. J.-C.).

[A.Ł.]


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