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Département de l'Art antique, inv. 198826.
Lieu et contexte de la découverte inconnus. Parvenue à la collection du Lyceum Hosianum à Braunsberg avant 1913, depuis 1947 au Musée National de Varsovie. Les éléments qui figurent dans l'inscription (l'épithète mikro/j, le verbe klai/w) permettent de voir dans ce monument une épitaphe judaïque du Delta oriental, vraisemblablement de Tell el-Yehoudieh (Léontopolis).
Calcaire. Dalle; h. 41 cm, l. 19,5 cm, ép. 8,5 cm; coin supérieur gauche retranché; surface de la pierre érodée, plus particulièrement dans l'angle inférieur droit. L'inscription est gravée dans un champ évidé rectangulaire aux dimensions: 31,5 cm, l. 14 cm. Gravure peu soignée; dans la partie finale, les lettres se superposent. Lettres lunaires et carrées. H. des lettres: 1,2 - 2 cm.
D'après la pierre à Braunsberg, S. de Ricci, Rev. épigr. 1 (1913), p. 148, no. 11 fac-similé, transcription en minuscules (J. Juster, Les Juifs dans l'empire romain I, Paris 1914, p. 497; Bilabel, SB IV 7295; Frey, CIJ II 1475; Lewis, CPJ III 1475). D'après une photo de la pierre au Musée National de Varsovie, Horbury-Noy, p. 134-135, no. 64, pl. XXII. D'après la pierre au Musée National de Varsovie, A. Łajtar, « The Jewish Epitaph SB IV 7295. A Suggestion for the Reading », JJP 28 (1998), p. 31-33 (tentative de restitution des lignes 1-2).
Cf. A. Łajtar, ZPE 125 (1999), p. 161, no. 97 (bibliographie).
I s. av. J.-C. - I s. ap. J.-C.
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1-2. [ ????]uon S. de Ricci, [ ???? ]i?]na...[ ]na...[ on Horbury-Noy qui suggèrent la lecture: [)Aqh]na/...[r]i?on ou [Qeo]na/...[r]i?on, [ ? ? ?]n a)/...[w]r?on suggéré par Łajtar || 10. L pierre
Pleurez [ - - - ], petite, aimée de tous, (âgée de) 32 ans. (Elle est morte) l'an 5, le 4 Tybi.
1-2.Après la lacune au début de la ligne 2 on voit le fragment inférieur d'une lettre avec un trait vertical au milieu. S. de Ricci voyait ici un « u», ce qui ne ressort pas à l'examen attentif de la pierre et, en plus, ne permet pas de construire un sens sans qu'on soit obligé d'apporter quelques rectifications. Horbury et Noy prennent cette lettre fragmentaire pour un « i» ([ ? ? ?]na...[ ? ]i?on) et proposent de lire ici un nom féminin du groupe de diminutifs terminés par -ion, comme [)Aqh]na/...[r]i??on ou [Qeo]na/...[r]ion. Pour sa part, Łajtar a suggéré qu'on pouvait y voir un « r» ([ ???? ]r????]n]na...[ on), ce qui nous amènerait à lire: [ a)/...[w]r?on. Au début de la ligne 1, il faudrait dans cette situation restituer le nom féminin de trois ou quatre lettres terminé à l'accusatif par -n. Parmi les noms attestés dans le milieu juif d'Égypte, ces conditions sont remplies par Ni/kh (Horbury-Noy, no. 61 [de Léontopolis]), Mari/a (Horbury-Noy, no. 120 [d'Alexandrie]; CPJ II 223 et 227 [d'Apollonopolis Magna] et ÑRoua= (Horbury-Noy, no. 15 [d'Alexandrie]); mais, bien évidemment, il faut aussi prendre en considération les noms de femmes juives non encore attestés en Égypte. La suggestion de Łajtar est d'autant plus probable que la lacune au début de la ligne 2 semble trop large pour un « r», mais correspond très bien à la largeur d'un « w». L'épithète a)/wroj revient très souvent dans les épitaphes judaïques de Léontopolis occupant habituellement la première place sur la liste des épithètes servant à qualifier le défunt, ce qui serait le cas dans l'inscription étudiée; cf. commentaire de l'inscription 84, l. 1. Les épithètes a)/wroj et mikro/j ont une signification très proche mais ne s'excluent pas, ce dont témoigne l'inscription Horbury-Noy, no. 97, provenant aussi de Léontopolis: Paouti/wna mikro\n a)/wron pasi/i)lon klau/sate. Mis à part l'ordre inversé des épithètes a)/wroj et mikro/j, les deux épitaphes sont identiques, ce qui pourrait suggérer l'existence d'un rapport plus étroit entre les deux monuments.
2-3. Sur mikro/j comme épithète du défunt (de la défunte) dans les épitaphes d'Égypte voir Horbury-Noy, commentaire du no. 64 (notre inscription). Elle est rare et caractéristique des épitaphes judaïques ou tenues pour judaïques. En dehors de notre inscription, nous la retrouvons dans les épitaphes Horbury-Noy, nos. 86, 97, 100 et 102. Elle y qualifie des personnes décédées respectivement à l'âge de 16, 28, 35 et 4 ans. Elle apparaît aussi dans les épitaphes judaïques de Beth She‘arim en Palestine: M. Schwabe, B. Lifshitz, Beth She‘arim II, The Greek Inscriptions, Jerusalem 1967, nos. 37, 93 et 97 (les défunts avaient respectivement 27, 3 et 28 ans). Compte tenue de ces observations, il est tout à fait légitime de croire que l'épithète mikro/j, tout comme a)/wroj, re-vêtait une signification beaucoup plus affective que descriptive et pouvait être employée pour qualifier toute personne qui, dans l'opinion de ses proches, était décédée « avant l'âge ». Le terme mikro/j et son correspondant copte koui apparaissent assez souvent dans les épitaphes chrétiennes d'Égypte, mais leur fonction y est complètement différente. En effet, ils servent à caractériser le défunt et n'ont pas le sens d'épithètes laudatives; cf. commentaire de l'inscription 99, l. 2.
6-7.Sur klai/w dans les épitaphes grecques d'Égypte voir Horbury-Noy, commentaire de nos. 34 et 64. Les auteurs remarquent que l'impératif de l'aoriste de klai/w à la deuxième personne du pluriel - klau/sate - est attesté pour la majorité des cas par les épitaphes judaïques ou tenues pour judaïques; les exemples en sont: Horbury-Noy, nos. 30, 34, 37, 64 (notre inscription), 83, 97, 99, 102. Ils recensent seulement deux occurrences de klau/sate dans les inscriptions non judaïques: SB I 5631 (Alexandrie, I-II s. ap. J.-C.) et SB IV 6706 (Karanis, date inconnue).
[A.T.]
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