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99. ÉPITAPHE DE L'APA IÔANNÈS

Département d'Art de l'Orient chrétien, inv. 198750.

Lieu et contexte de la découverte inconnus. Parvenue au Lyceum Hosianum à Braunsberg avant 1905/6 (no. d'inv. 864), depuis 1947 au Musée National de Varsovie. La pierre provient très certainement d'Égypte, mais il est impossible de préciser cette provenance.

Calcaire blanc. Plaque; h. 18 cm, l. 32,5 cm, ép. 4,5 cm; coin supérieur droit brisé; bords légèrement ébréchés. L'inscription est gravée dans des cadres qui délimitent le haut et le bas du texte ainsi que les marges de gauche et de droite et séparent toutes les lignes. Lettres carrées très étroites, légèrement inclinées à droite; les mêmes lettres revêtent des formes différentes (soit majuscules soit proches de la cursive), elles sont munies d'apices ou non; ligature OU, signe d'abréviation en forme de S. Alpha à barre brisée prolongée, upsilon soit avec un trait vertical soit en forme de chevron sans trait vertical. H. des lettres: 1,0 - 2,5 cm.

D'après une photographie fournie par W. Weißbrodt, Lefebvre, Recueil, p. 132, no.

671. D'après la pierre à Braunsberg, S. de Ricci, Rev. épigr. 1 (1913), p. 150, no. 16: transcription en majuscules et en minuscules (F. Bilabel, SB IV 7300).

Cf. W. Weißbrodt, Verzeichnis Braunsberg, Winter-Semester 1905-6, p. 22, note 1 (mentionne l'inscription qui, à l'époque, se trouvait déjà à Braunsberg et en cite quelques fragments). A. Łajtar, ZPE 125 (1999), p. 161, no. 103.

VI-VII s. ap. J.-C.

€ mnh/mh toË eÈmoi/rou

êpa ÉIwa/nnou mikroË

teleuth/santoj Xoi/ak ijÄ

4 th=j ßkthj i)nd(ikti/wnoj): eÈmoi/rei.

2. i+wannou pierre || 4. inds pierre

Tombe de l'apa Iôannès, le petit, d'heureuse mémoire, mort le 16 Khoiak, de la sixième indiction. (O Iôannès), soix heureux.

La formule mnh/mh tou= dei=noj apparaît encore dans une autre épitaphe chrétienne d'Égypte, à savoir dans Lefebvre, Recueil, no. 409, provenant d'Hermônthis. Quant à l'inscription de Panopolis, Lefebvre, Recueil, no. 284, interprétée par l'éditeur comme mnh/m(h) Marian (lire Mariam ?), il est possible d'envisager une autre lecture de l'abréviation, p.ex. mnhm(ei=on). Le faible chiffre d'occurrences de la formule mnh/mh tou= dei=noj attestées dans l'épigraphie funéraire chrétienne d'Égypte ne permet pas de répondre à la question de savoir si le terme mnh/mh, pour désigner la tombe, était d'usage géographiquement limité (Hermônthis et, peut-être, Panopolis) ou s'il était employé dans toute l'Égypte. mnh/mh tou= dei=noj n'est qu'une des variants de la formule générale « tombe d'un tel ou d'une telle », « monument funéraire d'un tel ou d'une telle ». Dans les inscriptions chrétiennes d'Égypte, dans la même position, apparaissent aussi les termes suivants: xamoso/rion (SB I 613; d'Alexandrie), ta/foj (Lefebvre, Recueil, no. 230; de Meïr), sth/lh (de très nombreux exemples provenant exclusivement de Panopolis), mnhmei=on (de très nombreux exemples provenant presque exclusivement de la région de Thèbes-Hermônthis).

Sur la signification du terme êpa dans les sources égyptiennes voir T. Derda, E. Wipszycka, « L'emploi des titres abba, apa et papas dans l'Égypte byzantine», JJP 24 (1994), p. 23-56. Le terme peut désigner aussi bien des ecclésiastiques (moines et prêtres) que des laïques. Rien n'indique que l'apa Iôannès de notre inscription soit moine.

Pour le terme mikro/j = « petit » et ses correspondants coptes kouiet Sm« pour désigner une personne dans les sources d'Égypte, voir W. E. Crum, Coptic Dictionnary, p. 92-94, s.v. koui; C. Wietheger, Das Jeremias-Kloster zu Saqqara unter besonderer Berücksichtigung der Inschriften [= Arbeiten zum spätantiken und koptischen Ägypten 1], Altenberge 1992, p. 273 et 279; D. Montserrat, G. Fantoni, P. Robinson, BASP 31 (1994), p. 66; A. Łajtar, JJP 26 (1996), p. 60-61. mikro/j peut se rapporter aux qualités physiques d'une personne (homme de petite taille) ou caractériser l'âge de celle-ci (homme jeune). Il peut être soit descriptif (l'apa Iôannès était tout simplement petit ou jeune) soit quantitatif; dans le second cas, il qualifierait le défunt par rapport à un autre apa Iôannès (p.ex. son père) qui, lui, serait grand ou vieux, tout en servant à distinguer ces deux personnes.

4. eu)moi/rei placé à la fin de l'inscription se rapporte au défunt; tout comme dans une épitaphe de Serdica (Sophia), de la basse Antiquité, V. Beševliev, Spätgriechische und spätlateinische Inschriften aus Bulgarien, Berlin 1964, no. 8: Ma/lxoj Su/roj luqourgo\j (sic) mnhmo/sunon xa/rin )Aprwni/aj Salwnitana\ kamou=sa met' e)mou= kalw=(j): (e)u)mu/ri, )Aprwni/a. Cette expression peut être rapprochée de la formule de voeu eu)moirw=j que l'on trouve, en position analogue, dans une épitaphe chrétienne d'Égypte (dont l'origine reste inconnue), conservée au Musée Copte du Caire: W. Brunsch, Aegyptus 73 (1993), p. 138-139, no. 11, l. 7. Les deux expressions sont en rapport évident avec la formule eu)moi/rei w)= dei=na, ou)dei\j )qa/natoj apparaissant dans les inscriptions funéraires, d'abord païennes puis chrétiennes, issues de la Méditerranée orientale; cf. p.ex. S. Şahin dans: Erol Atalay Memorial, Izmir 1991, p. 183-190. Dans l'Égypte impériale ainsi que celle de la basse Antiquité, le terme eu)/moiroj était employé pour désigner les défunts et correspondait plus ou moins à la formule moderne « de bienheureuse mémoire »; cf. T. Derda, « Eumoiria, a Proper Name or an Epithet of Deceased », ZPE 64 (1986), p. 87-90. C'est dans cette fonction qu'il apparaît dans quelques épitaphes chrétiennes issues d'Égypte méridionale; cf. Lefebvre, Recueil, nos 569 et 581. Pour les généralités sur l'emploi des termes eu)/moiroj, eu)moirw=j, eu)moi/rei dans le contexte funéraire, voir L. Robert, BCH 102 (1978), p. 414-415 = idem, Documents d'Asie Mineure [= Bibliothèque des Écoles Françaises d'Athènes et de Rome 239 bis], Paris 1987, p. 110-111.

[A.Ł.]


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