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55. INSCRIPTION DU CADRAN SOLAIRE

Département de l'Art antique, inv. 198850.

Lieu et contexte de la découverte inconnus. Au début du XX s. vue par Arvanitakis, puis par Rubensohn dans le commerce des antiquités en Égypte. Achetée avant 1909 sur le marché des antiquités au Caire pour la collection du Lyceum Hosianum à Braunsberg (no. d'inv. 880), depuis 1947 au Musée National de Varsovie.

Marbre blanc, très fortement patiné, devenu gris (l'identification de la pierre faite par Rubensohn, granit rouge, est erronée); pierre de mauvaise qualité, avec de nombreux petits graviers et trous; h. 27 cm, l. 38,3 cm, ép. 20,8 cm; légèrement endommagée; petites ébréchures sur les arêtes, la petite brèche à l'emplacement du style inexistant comblée de plâtre. L'ensemble est travaillé dans un bloc monolithe: le cadran même, sous forme d'un quart de sphère concave, « repose » sur une petite base plus large que celui-ci de 7 cm à l'avant du marbre. Le cadran porte un système de lignes gravées servant à indiquer la longueur et la direction de l'ombre (arachnè). Le système comprend trois lignes concentriques et onze lignes convergentes (horaires). Au sommet, une petite cavité permettant de fixer un style; le style (gnomon), originairement sans doute en bronze, aujourd'hui disparu. La ligne 1 de l'inscription gravée entre le cadran et la base; la ligne 2 sur la face avant de la base. Lettres gravées avec peu de soin; traces évidentes de couleur rouge au fond des lettres; apices esquissés. Alpha à barre en arceau, omicron un peu plus petit que les autres lettres, dans le sigma, les traits extérieurs tantôt obliques tantôt horizontaux. H. des lettres dans la ligne 1: env. 1,5 cm, dans la ligne 2: env. 1,0 cm. À proximité de l'endroit où était fixé le style une inscription à l'encre noire: « Beihilfe der Provinz ».

D'après la pierre vue chez l'antiquaire Maurice Nahman, G. Arvanitakis, Bull. Inst. Égypt. 4 (1903), p. 43-44, no. VII. D'après la pierre vue sur le marché des antiquités au Caire avec la notice selon laquelle la pièce avait été achetée pour le Lyceum Hosianum et se trouvait déjà à Braunsberg, O. Rubensohn, AfP 5 (1) (1909), p. 161-162, no. 7 (P. M. Fraser, Ptolemaic Alexandria II [1972], p. 125, note 76). D'après la pierre à Braunsberg, Weißbrodt, Verzeichnis Braunsberg, Sommer-Semester 1913, p. 14, no. 8.

Cf. A. J. Reinach, REG 23 (1910), p. 338 (sur la publication de Rubensohn). M. Launey, Recherches sur les armées hellénistiques II, p. 842-843 (seulement mentionnée). A. Łajtar, ZPE 125 (1999), p. 157, no. 57 (bibliographie).

153/2, 141/40 ou 88/87 av. J.-C., d'après l'année régnale et la paléographie.

ÑHfaisti/wn ÑHrw/idou )Arsinoeu\j gumnasiarxh/saj to\ kq / (e)/toj) ÑErmei=?.

1. ÑHfaistei/wn Neoi/dou Nhsinqeu/j Arvanitakis || 2. L pierre | ÑErme[i= Rubensohn

Héphaistion fils de Hérodès du dème Arsinoïs (a érigé ce cadran solaire) après avoir exercé en l'an 29 la charge de gymnasiarque (en le dédiant à) Hermès.

)Arsinoeu/j serait dans ce contexte un démotique formé sur le nom d'une des reines ptolémaïques du III s. av. J.-C. (Arsinoé II ou III), il est cependant difficile de dire si c'est un démotique d'Alexandrie ou de Ptolémaïs; cf. Fraser, loc. cit. Le fait que le monument fut acquis sur le marché des antiquités au Caire indiquerait qu'il est plutôt originaire de la Basse Égypte (donc d'Alexandrie). Il faut toutefois tenir compte du fait que la collection des inscriptions grecques d'Égypte au Lyceum Hosianum, constituée par des acquisitions faites justement sur le marché du Caire, abritait aussi des inscriptions provenant indubitablement de la Haute Égypte (cf. infra, no. 66: titulus d'un topos des tisserands d'Abydos), ce qui ne permet pas d'exclure définitivement l'hypothèse de Ptolémaïs.

La paléographie de l'inscription est caractéristique de la seconde moitié du II - première moitié du I s. av. J.-C. Dans ce contexte, la date (l'an 29) doit correspondre au règne d'un des rois suivants: Ptolémée VI Philométor (153/2av. J.-C.), Ptolémée VIII Évergète II (141/40 av. J.-C.), Ptolémée IX Sôter II (88/87 av. J.-C).

Le fait que le cadran solaire est dédié à Hermès, dieu du gymnase, et que l'auteur de la dédicace est appelé ex-gymnasiarque indiquent que le cadran était destiné au gymnase. Héphaistion fils de Hérodès l'a vraisemblablement offert au moment de quitter sa fonction de gymnasiarque à l'institution dont il avait assuré la gestion pendant un an. La présence d'horloges, y compris de cadrans solaires, dans les gymnases est attestée par des inscriptions; pour les généralités à ce sujet voir J. Delorme, Gymnasion. Étude sur les monuments consacrés à l'éducation en Grèce (des origines à l'Empire romain) [= Bibliothèque des Écoles Françaises d'Athènes et de Rome 186], Paris 1960, p. 368. L'inventaire du gymnase de Délos établi sous l'archonte Callistratos (156/5 av. J.-C.) mentionne un cadran solaire placé sur une colonnette (ID 1417, l. 149). Dans la sphairistra du même gymnase se trouvait une autre horloge surmontée d'un petit triton, elle aussi énumérée dans l'inventaire de Callistratos (ID 1417, l. 140); il s'agissait vraisemblablement d'une horloge à eau. Le gymnase de Pergame possédait, lui aussi, un cadran solaire situé à l'entrée de l'exèdre érigé en l'honneur du grand évergète pergaménien du milieu du I s. av. J.-C., Diodoros Pasparos, ce que mentionne un des décrets honorifiques pour Diodoros (H. Hepding, AM 32 [1907], p. 257-272, no. 8, col. I, l. 35: skiako\j w(rolo/gion). Le même cadran est mentionné, selon une reconstitution très probable de Delorme, op. cit., p. 185, note 1, dans le décret pour un autre évergète pergaménien, Straton fils de Straton (Hepding, AM 32 [1907], p. 278-284, no. 11, fr. b-f, ll. 44-45).

Pour les généralités sur les cadrans solaires antiques, voir S. L. Gibbs, Greek and Roman Sundials, New Haven 1976. L'auteur mentionne 5 cadrans solaires en provenance d'Égypte (nos. 1040G, 3086G, 3087, 3089, 4015), tous anépigraphes; le cadran conservé au Musée National de Varsovie ne figure pas sur sa liste. À cette liste il faudrait d'ailleurs ajouter l'inscription IFayoum III, no. 206 (Fayoum, basse époque hellénistique): dédicace d'un cadran solaire et d'un puits, destinés vraisemblablement à une synagogue judaïque; sur cette inscription cf. dernièrement Horbury-Noy, no. 115 (avec bibliographie complète).

[A.Ł.]


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